australis

Étendue sur le lit à regarder le plafond, faussement désinvolte, je t’ai exposé une liste d’arguments pour que tu ne partes pas. Des arguments qui, dans le fond, ne pourraient convaincre personne. Je t’ai parlé de la taille anormale de la faune qui peuple l’Australie, à commencer par les araignées. “Elles sont grosses comme ça !” t’ai-je dit en supposant un cercle immense avec mes mains. Qui peut décemment vivre dans un pays avec d’aussi dangereux prédateurs ? Tu m’as regardée et tu m’as souri, je crois avoir perçu de la compassion. Pour moi, pour un avenir commun qui n’existera jamais, ou bien c’est ce que je projette pour m’apaiser.

Tu as déclaré faire ça pour ton petit frère, cet enfant qui a l’âge d’être le tien. Toi qui as 40 ans, toi qui veux lui assurer un lendemain plus éclairé. C’est drôle comme on peut sacrifier tant de choses pour les enfants, ils ont l’innocence pour eux. Je suis bien égoïste, je m’en veux de trouver ça injuste. Mais c’est plus fort que moi. Je n’ai rien laissé paraître alors que mon cœur et mes poumons se sont serrés, à étouffer. Je veux pleurer comme si j’avais huit ans moi aussi. La situation est impossible, je ne veux pas qu’elle existe.

Je me suis redressée au milieu du lit, tu t’es assis derrière moi et tu m’as enlacée. Tu t’es voulu rassurant, tu allais déjà de l’avant, ça m’a dépassée. Je te veux ici, pas là-bas, mais je me suis tue. Et maintenant que tu es parti, je pense à ton sourire et tout ce qu’on aurait pu faire ensemble. Peut-être aurions-nous dû nous rapprocher davantage, au moins le temps d’une nuit, pour l’expérience et les souvenirs. Au lieu de ça, je m’enfoncerai dans les regrets permanents, je te reverrai simplement me sourire, ton putain de sourire sincère, et je ne ressentirai rien de plus que tes bras autour de moi. Je ne saurai jamais ce que tu éprouvais pour moi parce que je ne te l’ai pas demandé, et je me réveillerai chaque matin en me demandant si tu as vraiment existé.

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